Olivier, bénévole auprès des personnes prostituées à Paris

Les bénévoles sont la clé de voute de l’association Aux captifs, la libération. Nous vous proposons donc de découvrir le portrait de l’un d’eux, Olivier Bazil, bénévole à l’antenne de Lazare (16ème). Tous les mardis soir, à partir de 18h30, il retrouve son trinôme pour sa tournée-rue en camion au bois de Boulogne.


  • Depuis combien de temps êtes-vous bénévole aux Captifs ?

«  C’est ma quatrième année de bénévolat aux Captifs. J’ai commencé par l’accueil des hommes le lundi après-midi puis l’association m’a proposé d’étoffer mon engagement en tournant tous les mardis soir au bois de Boulogne. Dans le cadre de ces tournées-rue (ou maraudes) en camion, nous rencontrons une population plutôt féminine, souvent trans ou travestie mais qui sont avant tout des personnes. »

  • Qu’est-ce que vous apporte cet engagement ?

« Depuis plusieurs années déjà, j’aspirais à ne pas me laisser enfermer et à trouver une ouverture sur un monde différent de celui de mes contacts habituels : j’ai eu une famille formidable, une bonne éducation, une carrière professionnelle intéressante et je pense que je n’aurais pas eu une vie « complète » si je n’avais pas eu la chance de ces rencontres avec ces personnes de la rue ou du bois, qui représentent un autre type de « prochain » que le Christ nous enseigne d’aimer.

Ces tournées-rue permettent souvent le tissage de vrais liens de confiance avec les personnes que nous rencontrons et il nous est même parfois donné de vivre des grâces exceptionnelles, comme celle que je voudrais vous raconter.
C’était un mardi soir, nous abordions deux personnes que nous connaissions bien pour échanger comme d’habitude au pied de leur camion, quand elles nous ont annoncé le décès brutal d’une collègue : elles étaient là toutes les deux, dans la nuit du bois, traumatisées par cette nouvelle terrible et par le fait que leur amie s’étant progressivement refermée sur elle-même, elles avaient été impuissantes et incapables de la sauver.
Que faire ? Notre suggestion d’une prière aussitôt acceptée, ce fut tout d’un coup un vrai moment de grâce : ces deux femmes, profondément bouleversées, ont improvisé dans la nuit une prière d’une spiritualité intense et qui révélait leur évidente proximité avec la Vierge Marie et avec son fils : nous, bénévoles, n’avions rien dit mais ce soir-là j’ai compris pourquoi Jésus pouvait se sentir très proche de certains pécheurs. »

  • Quelle est votre place aux Captifs ?

« Je suis un simple bénévole qui donne un peu de son temps et qui reçoit énormément. Etant généralement le plus vieux de la bande, les personnes du bois m’attribuent souvent spontanément le rôle du père, grand-père, tonton ou « abba ». Ces surnoms affectueux, énoncés avec un respect malicieux, permettent parfois de glisser plus facilement un commentaire ou un conseil, à condition de ne pas trop abuser du procédé ! »

  • Que diriez-vous à quelqu’un qui souhaite et/ou qui hésite à s’engager ?

« Je dirais deux choses : la première, n’ayez pas peur ! En tant que bénévoles, nous sommes formés et encadrés et nous ne sommes jamais seuls ; et de plus le contact avec les personnes de la rue ou en situation de prostitution est souvent plus facile que l’on ne croit : beaucoup sont avides de parler, de justifier leurs choix, d’expliquer leur vie et leurs soucis. Et si d’autres le sont moins, il est très rare qu’elles résistent au bout d’une dizaine de sollicitations souriantes et courtoises… Cela peut prendre du temps mais lorsque l’armure accepte de s’entrouvrir, alors tout devient possible.

Et puis surtout les femmes et les hommes du bois sont des personnes comme nous tous : ils ont des problèmes, des tristesses, des amours, parfois des enfants… Ce sont des PERSONNES – parfois d’ailleurs profondément spirituelles. Et les discussions de toutes sortes sont souvent passionnantes »

  • Pourquoi vous êtes-vous spécifiquement engagé aux Captifs ?

« J’ai connu les Captifs grâce à mes enfants qui m’avaient attiré à un pèlerinage à Lourdes de l’ABIIF, les jeunes brancardiers d’Ile-de-France.
Pendant le séjour j’avais remarqué la présence d’une religieuse toute petite et qui était toujours entourée de 4 grands gaillards particulièrement attentifs et délicats avec les malades, et toujours disponibles. Intrigué, j’ai demandé un jour : « Mais Sœur Solange qui sont donc vos 4 gardes du corps ? ». Elle me répondit en souriant : « Ce sont des gars de la rue, qui sont depuis longtemps aux Captifs ; ils ont été volontaires pour venir aider pendant le pèlerinage mais après ils retournent à la rue ». J’ai compris que l’un d’entre eux était musulman, un autre plutôt agnostique mais tous avaient une belle personnalité et ils venaient s’ouvrir à autre chose que la rue. D’ailleurs l’année suivante j’ai retrouvé l’un d’eux à Lourdes et nous nous sommes embrassés comme du bon pain !
A l’époque, je n’avais pas beaucoup de temps libre alors j’ai commencé par devenir donateur tout en gardant l’idée de venir frapper à la porte des Captifs un peu plus tard. »

Un grand merci Olivier d’avoir accepté de nous livrer de l’intérieur votre ressenti et partagé votre expérience d’engagement. Merci à tous les bénévoles Captifs pour leur engagement.